Que penser de l’una cum ?
Tout d’abord, détaillons le problème. Pour les sédévacantistes, faire la messe « una cum » signifie que nous sommes « en union » avec le pape François, et donc en union avec ses erreurs.
1) Mgr Lefebvre et l’una cum (retraite prêchée aux religieuses de Saint-Michel-en-Brenne, le 1er avril 1989)
Ecoutons la pensée de Mgr Lefebvre sur cette question. Il faut noter que cette conférence date de 1989, soit 4 ans après le scandale d’Assise, où le pape Jean Paul II n’a pas fait d’acte plus scandaleux que ceux que nous subissons aujourd’hui sous le pontificat du pape François.
"DOM GUILLOU repasse toutes les prières du Canon romain. Il les repasse les unes après les autres et il montre la différence. Il donne des traductions, de très bonnes traductions. […] Par exemple, pour […] ce fameux una cum.., una cum des sédévacantistes. (...)
« — Eh ! est-ce que vous dites una cum ? Vous dites una cum dans le canon de la messe ! Alors on ne peut pas prier avec vous, vous n’êtes pas catholiques, vous n’êtes pas ci, vous n’êtes pas ça, vous n’êtes pas... » Ridicule ! ridicule ! Parce qu’ils prétendent que quand on dit una cum summo Pontifice, avec le pape, n’est-ce pas, alors vous épousez donc tout ce que le pape dit. C’est ridicule ! Ce n’est pas du tout le sens de la prière. Te igitur clementissime Pater, n’est-ce pas. C’est la première prière du Canon. Voici comment traduit Dom Guillou, une traduction très exacte […] : « Nous vous prions donc avec une humilité profonde, Père très clément et nous vous conjurons par Jésus-Christ, votre Fils, Notre-Seigneur, d’agréer et de bénir ces dons, ces présents, ces sacrifices, purs et sans tache, que nous vous offrons premièrement pour votre sainte Église catholique. Qu’il vous plaise de lui donner la paix, de la garder, de la maintenir dans l’unité, et de la gouverner par toute la terre, et avec elle, votre serviteur notre saint Père le pape... »
Il n’est pas dit dans cette prière que nous épousons toutes les idées que le pape peut avoir ou toutes les choses qu’il peut faire. « Avec elle, votre serviteur notre saint Père le pape, notre évêque et tous ceux qui ont le culte de la foi orthodoxe catholique et apostolique ! »
Donc, dans la mesure justement où, éventuellement, malheureusement, les papes […] seraient déficients dans la foi orthodoxe, catholique et apostolique, eh bien, nous ne sommes pas en union avec eux, nous ne sommes pas avec eux, bien sûr. Nous prions pour le pape et tous ceux qui ont le culte de la foi orthodoxe catholique et apostolique ! Il [Dom Guillou] avait une petite note à ce sujet là, pour éclaircir un petit peu, justement :
Dans la traduction officielle, basée sur une étude critique de Dom Botte, l’UNA CUM, ou « en union avec » des sédévacantistes de toute nuance, n’équivaut plus qu’à la conjonction « et » renforcée, soit pour le besoin de reprendre la phrase, soit pour correspondre au style solennel du canon romain. De toute façon, tout catholique reste toujours en union avec le pape dans la sphère précise où s’exerce l’assistance divine, infaillibilité confirmée par le fait que dès qu’il y a écart de la tradition dogmatique, le discours papal s’empêtre dans des contradictions. Recueillons le bon grain, sachant que pour le reste, il est plus nécessaire que jamais de demander à Dieu, avec les très antiques Litanies majeures, que soient « conservés dans la sainte religion » les « ordres ecclésiastiques » et le « Seigneur apostolique » lui-même (c’est-à-dire le pape) : « Ut dominum apostolicum et omnes ecclesiasticos ordines in sancta religione conservare digneris, te rogamus, audi nos. »
C’est une des demandes des litanies des saints n’est-ce pas. On demande de garder le pape dans la véritable religion. Nous demandons cela dans les litanies des saints ! Ce qui prouve que, quelquefois, il peut se faire que malheureusement peut-être, il y ait des hésitations ; il y a des faux pas ; il y a des erreurs qui sont possibles. On a trop facilement cru depuis le concile Vatican premier, que toute parole sortant de la bouche du pape est infaillible. Il n’a jamais été dit ça dans Vatican premier ! Jamais le concile n’a dit une chose pareille. Il faut des conditions très précises pour l’infaillibilité ; des conditions très, très précises. La meilleure preuve c’est que pendant tout le Concile [Vatican II] le pape Paul VI a dit lui-même : « Il n’y a rien dans ce concile qui soit sous le signe de l’infaillibilité ». Alors, c’est clair, il le dit lui-même ! Il l’a dit explicitement. Il ne faut pas garder cette idée qui est fausse et qu’un certain nombre de catholiques mal instruits, mal enseignés, croient ! Alors, évidemment, on ne comprend plus, on est complètement désespéré, on ne sait pas à quoi s’en tenir ! Il faut garder la foi catholique telle que l’Église l’enseigne."
2) La pensée de Mgr Lefebvre, est-elle confirmée par d’autres éléments ?
La pensée de Mgr Lefebvre et de Dom Guillou est que l’expression « una cum » signifie « et avec elle » (l'Eglise pour laquelle on prie) "le nom du pape" et non pas « prier en communion avec … ». En d'autres termes, on prie "pro ecclesia", et aussi pour le pape. La véracité de cette affirmation est-elle justifiée par d’autres éléments ?
Oui.
En effet, on lit dans le Martyrologe au 16 mars :
Aquiléjæ natális beáti Hilárii Epíscopi, et Tatiáni Diáconi, qui, sub Numeriáno Imperatóre et Berónio, Præside, post equúleum atque ália torménta, una cum Felice, Largo et Dionysio, martyrium terminárunt .
Il est facile de voir que l’expression « una cum » ne peut pas signifier « une avec ». En effet « una » n’est pas ici un adjectif. Sinon il faudrait dire « uni cum » quand il s’agit d’un pluriel, etc. Or ce n’est pas le cas dans l’exemple présenté ci-dessus.
On ne peut pas non plus traduire « una cum » par « en communion avec », « en union avec ». Voici un exemple où cette traduction est impossible, dans le Martyrologe au même jour (16 mars) :
Anazárbi, in Cilícia, sancti Juliáni Mártyris, qui, sub Marciáno Præside, diutíssime cruciátus, demum, in sacco una cum serpéntibus inclúsus, in mare demérsus est .
Il est bien clair que saint Julien ne devait pas se sentir « en communion » ni « en union » avec les serpents qui partageaient son sort. L’expression « una cum » signifie donc, dans ces textes, simplement « cum ».
L’expression « una cum » dans le canon de la messe ne signifie pas qu’on se dise « en communion » avec la personne du pape et ses idées erronées, mais qu’on veut prier pour l’Église « et pour » le pape.
Pour s’en assurer, outre les études savantes produites sur le sujet, il suffit de lire la rubrique du missel pour le cas où un évêque célèbre la messe. En effet, dans ce cas l’évêque doit prier pour l’Église « una cum (…) me indigno famulo tuo » ce qui ne veut pas dire qu’il prie « en union avec moi-même, votre indigne serviteur » (ce qui n’a pas de sens), mais qu’il prie « et pour (…) moi-même, votre indigne serviteur ».
3) Objection
François et les papes conciliaires sont objectivement hérétiques. Mais saint Thomas d’Aquin ne dit-il pas que dans le canon on ne doit pas prier pour les hérétiques ?
REPONSE :
Saint Thomas d’Aquin n’interdit pas de prier pour les hérétiques, mais constate simplement que, dans les prières du canon de la messe, on prie pour ceux dont le Seigneur connaît la foi et a éprouvé l’attachement (quorum tibi fides cognita est et nota devotio) (III q. 79, a. 7, ad 2). En effet, dit-il, pour que ce sacrifice obtienne son effet (effectum habet), il faut que ceux pour qui l’on prie soient « unis à la passion du Christ par la foi et la charité ». Mais il n’interdit pas pour autant de prier pour une personne non catholique. Cette prière n’aura pas la même efficacité que celle pour un catholique, et n’est pas prévue dans le canon.
Tout ce qu’on peut tirer de cette affirmation de saint Thomas d’Aquin, c’est que si le pape est hérétique, la prière pour lui n’a pas l’effet prévu, « non habet effectum ».
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